Arequipa et le canyon de Colca

Arequipa est une ville étonnante car elle est très différente des autres villes péruviennes qu'on a vu jusqu'à maintenant. C'est une très belle ville, moderne avec une belle place qui fait penser aux places d'Espagne avec les pigeons, les fontaines et les palmiers. C'est la deuxième ville du pays mais ici les gens revendiquent leur différence, ils sont arequipéniens avant d'être péruviens. C'est aussi la ville natale du plus grand écrivain vivant, Mario Vargas Llosa.

C'est vrai que la ville est belle, propre. Beaucoup de maisons sont construites en pierre de lave blanche car elle est situé au pied de trois majestueux volcans dont le plus proche, le Misti, surplombe la ville du haut de ses 5825 mètres. On a d'ailleurs hésiter à en faire l'ascension mais on n'a finalement pas eu le temps (et vu que d'autres beaux volcans nous attendent sur notre parcours, on a préféré se concentrer sur le canyon de Colca.)

A Arequipa, en dehors de la visite de la ville, qui vaut le détour, car il y de beaux bâtiments, cloîtres et églises, nous sommes allés au musée Santuarios Andina pour voir la fameuse momie Juanita, princesse des glaces découverte en 1995 à la suite de l'éruption d'un volcan, le Sabancaya. Le glacier qui recouvrait le volcan Ampato s'est mis à fondre et l'équipe de chercheurs a pu mettre à jour quatre momies d'enfants dont une au sommet, à 6380 m, celle de Juanita. La belle jeune fille serait restée 530 ans dans les glaces du volcan ! Pour les Incas, les montagnes étaient vivantes, donc quand un volcan rentrait en éruption, ils faisaient des sacrifices, parfois humains pour calmer ce qu'ils croyaient être la colère des Dieux. Le guide nous a expliqué que c'était toujours de enfants qui étaient sacrifiés et qu'on choisissait les plus belles jeunes filles qui étaient encore vierges. Effectivement Juanita était une belle jeune fille, la momie est étonnament bien conservée, avec ses cheveux, sa peau, ses ongles ...

Une telle rencontre ne laisse pas indifférent et on se pose beaucoup de questions face à cette jeune fille qui a traversé les siècles. Son état de conservation est tel que les chercheurs ont pu définir les maladies, les virus ou bactéries qui l'ont atteinte, le type d'alimentation de son époque, ou encore son état de santé au moment de sa mort. C'est la momie la mieux conservée de toutes celles découvertes aux sommets des montagnes et pour cette raison elle n'est pas toujours visible au musée car une partie de l'année les chercheurs continuent à l'étudier. On a donc eu de la chance de la voir !

Après cette rencontre émouvante, nous avons pris le chemin du canyon de Colca, deuxième canyon le plus profond du monde avec un dénivelé de 3200 mètres ! Le long du chemin nous avons rencontré les condors, l'oiseau sacré des Andes, qui profitent des vents chauds du matin pour faire planer leur 10 à 15 kilos. Quand ils passent au dessus de nos têtes, c'est plutôt impressionnant car ils ont une sacrée envergure ! Le ciel prend d'un coup une autre dimension avec le balai aérien de ces immenses oiseaux ! Les males sont reconnaissables à leur col blanc et chose étonnante, il n'y a qu'un oisillon qui naît par an. Si par hasard il y a deux naissances, seul l'un des deux survivra !

 Une fois ce bel intermède finit, nous entamons la descente dans le canyon qui est impressionnant par sa taille et sa végétation. En face de nous, sur l'autre versant, nous voyons les minuscules villages dans des oasis de verdure. Tout autour, ce n'est que cactus, roches et désolation.

Après être arrivés tout en bas, au bord du Rio, nous n'avons plus qu'à remonter en face (sacré jeu !). Nous faisons notre pause déjeuner dans la cour de l'école à San Juan de Chuccho. Imaginez une minuscule école accrochée aux flancs de la montagne avec une trentaine d'élèves et une vue imprenable sur le canyon ! Malheureusement pour moi, les élèves ne sont pas à l'école car on est samedi. Quel dommage ! On continue notre ascension jusqu'au village de Tapay et alors là c'est encore plus le coup de coeur ! Pour rentrer dans le village, on passe sous une arche en pierre et puis on déambule dans des ruelles en pierres et en terre battue. Derrière des petits murets, des moutons ou des cours intérieures où sèche du linge ou des graines. On a l'impression d'être au bout du monde et puis soudain au détour d'une ruelle déserte on débouche sur la place du village. Un enfant court dans l'allée en se dévissant la tête pour regarder voler son cerf- volant artisanal fait avec un morceau de plastique ... sur un banc, une jeune maman nourrit à la cuillère sa petite fille grâce à un gros bol de soupe. Quelle sérénité ici ! En haut de la place, la petite église est tout aussi étonnante : la première partie intérieure semble être en chantier, il y a des meubles entassés d'un côté et un gros vide de l'autre. Sur le côté de la place, l'école, toujours aussi minuscule que celle du village en dessous. Un terrain de foot trône devant. Je suis vraiment frustrée de tomber un week-end et de ne pas pouvoir assister à la classe dans un endroit comme celui-là !

Une ruelle plus loin, nous tombons sur un écriteau qui indique des chambres chez l'habitant. Nous allons voir et tombons sur un endroit idyllique appelé Elcanto. C'est un couple assez âgé qui nous reçoit et ils sont tous les deux d'une extrême gentillesse ! On dort dans des petites huttes avec toit en chaume, on se douche dans une petite cabane de terre et de bambou où on a de l'eau plus chaude que dans certains hôtels du Pérou (mais ici ils ont un panneau solaire !) et on mange sous un auvent en bambou un délicieux steck d'alpaga, une bonne soupe et un maté de coca confortablement calés sur des peaux de lama ... bref, c'est le paradis ! On y rencontre aussi deux français très sympas qui nous donnent des tuyaux pour le Machu Picchu et pour le lac Titicaca car ils en reviennent !

Le lendemain, nous prenons la direction du retour et quittons ce petit coin de paradis où les gens sont à une journée de marche du gros village le plus proche mais où ils vivent dans une grande tranquillité et dans un environnement extraordinaire ! Nous redescendons en direction du village de Cosnirhua puis Malata où nous rencontrons Victoria qui a eu la bonne idée de rassembler dans une pièce tout ce qui fait la culture quechua. Passionnée, elle nous explique leur mode de vie et nous montre les différets outils qu'ils utilisent encore aujourd'hui. Pour séparer le riz de son enveloppe notamment, ils utilisent une pierre rectangulaire et rugueuse qui provient d'un volcan et ils frottent dans un mouvement de va et vient le riz sur la pierre. Ce travail très difficile et long est réservé aux hommes. Par contre pour faire de la farine de maïs, c'est plus facile et ce sont les femmes qui le font. L'ustensile utilisé est rond et creux et ils utilisent une pierre pour concasser le maïs. Elle nous montre aussi comment ils tressent les grandes feuilles sèches que l'on trouve ici pour en faire des cordelettes ou des frondes pour chasser les animaux du coin. De même, elle nous explique que les femmes tissent une manta en un mois et qu'elles le gardent à vie (la manta est la grande couverture que les femmes mettent dans leur dos et qui leur sert de sac à dos ou de porte-bébés). En quechua, ça s'appelle une llincha. C'est beaucoup de travail car c'est un tissage très serré qui permet de porter de lourdes choses sans problème. Elle nous montre aussi la bourse de taureau qu'ils utilisent comme porte-monnaie à la maison !!! Les habits sont aussi typiques car chaque région, chaque communauté à des habits et des chapeaux particuliers. Ici notamment les chapeaux sont entièrement décorés et brodés et représentent les symboles du coin (fruits, flore ...) Elle nous explique aussi que les villages du canyon qui entretiennent les sentiers (car pour eux c'est une nécessité) se font littéralement volés par Chivay, la ville située à l'entrée de la vallé qui mène en canyon. En effet celle-ci prend une taxe d'entrée sur tous les touristes qui passent pour aller dans le canyon de Colca mais elle ne redistribue pas l'argent aux villages du canyon et personne ne sait où va l'argent ! Malheureusement il y a beaucoup de corruption au Pérou !

Nous continuons notre route jusqu'à l'oasis de Sangalle ... tout au fond du canyon. Ici, végétation à profusion et sources thermales nous permettent de faire une agréable pause de midi et de nous baigner car il fait très chaud avant d'attaquer la grosse remontée jusqu'au village de Cabanaconde. C'est déjà la fin de notre trek !

Dans le canyon, les sentiers sont vraiment magnifiques et on évolue au milieu des cactus, parmi une végétation aride tandis que les petits villages apparaissent comme des atolls de végétation et de verdure, agrippés aux parois vertigineuses de la montagne ! Assurément, c'était un beau trek avec une nuit inoubliable à Tapay !



10/09/2010
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